Décarboner sa trésorerie : le prochain combat naturel des sociétés engagées
- Vincent Auriac
- 8 déc.
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : il y a 6 jours

Imaginez : votre entreprise est officiellement « à mission » ou B Corp. Vous avez gravé dans le marbre des statuts une raison d’être ambitieuse pour le climat, la biodiversité ou la justice sociale. Vous mesurez vos émissions, sourcez vos fournisseurs, compensez ce qui reste. Bravo.
Et pourtant, chaque nuit, plusieurs millions d’euros de votre trésorerie dorment tranquillement… dans des produits qui financent le monde d'hier et génèrent du CO2, le gaz à effet de serre qui participe au changement climatique.
Paradoxe ? Non : simple angle mort.
Dans une récente étude, Axylia a identifié 2500 milliards d'euros de trésorerie détenue en France par les différents acteurs économiques. La trésorerie des entreprises dépasse les 1 000 milliards d’euros en 2025 – plus que ce qu’il nous faudra investir collectivement pour décarboner le pays d’ici 2035 (source Reclaim Finance). Ce matelas est logé dans quatre ou cinq grandes banques qui, l’an dernier encore, ont injecté plus de 20 milliards d’euros dans l’expansion des énergies fossiles. Votre argent travaille donc activement contre votre mission. Il est temps que ça change. La trésorerie est le puissant levier d’impact que vous ayez encore ignoré. Et pourtant, presque personne n’en parle dans les comités de mission ou d'audit.
Et les sociétés à mission ont une longueur d’avance légale et morale pour montrer la voie.
La trésorerie, c’est de l’investissement (qu’on le veuille ou non)
Quand vous laissez 1 millions d’euros sur un compte courant ou un livret bancaire classique, votre banque ne le garde pas dans un coffre. Elle le prête, le réinvestit, le met au travail. Résultat : vos liquidités génèrent des « émissions financées » (Scope 3 catégorie 15 du GHG Protocol). Des études récentes estiment que 100 millions d’euros placés dans une grande banque européenne « classique » émettent entre 2 000 et 5 000 tonnes de CO₂ par an – l’équivalent de 500 à 1 300 allers-retours Paris-New York en avion.
C’est souvent plus que vos émissions directes (Scope 1+2) réunies. C'est très décourageant pour le travail quotidien de vos équipes. Cela ne les décourage pas (encore) car elle ne sont pas au courant. Mais ça pourrait changer.
Les sociétés engagées en première ligne
Vous avez choisi d’être exemplaires. Vous avez accepté l’opposabilité juridique de vos objectifs sociétaux et environnementaux. Vous vous faites auditer chaque année par un organisme tiers indépendant.
Alors pourquoi accepteriez-vous que votre trésorerie finance l’exact opposé de votre raison d’être ? La CSRD (qui s’applique progressivement dès 2025-2026) va d’ailleurs vous obliger à déclarer vos impacts financiers indirects. Autant prendre les devants et transformer cette contrainte en opportunité d’impact massif et immédiat.
Oui, c’est possible. Et non, ça ne coûte (presque) rien
Contrairement aux idées reçues, décarboner sa trésorerie ne sacrifie ni la sécurité ni la rentabilité. Voici les étapes concrètes que certaines entreprises ont déjà franchies :
Étape 1 – Mesurer (ça ne prend pas longtemps)
Axylia a développé une expertise sur le climat depuis 2019 avec le lancement du Score Carbone Axylia. Demandez nous un audit climat de votre trésorerie. Vous aurez immédiatement votre empreinte carbone.
Étape 2 – Migrer (résolument et sans douleur)
Des solutions existent à tous les niveaux de rendement, de sécurité et surtout de liquidité :
Fonds monétaires ESG performants
Fonds à impact
Patagonia a basculé toute sa trésorerie en 2017 après avoir découvert que ses banques finançaient le pipeline Dakota Access. Résultat : zéro perte de rendement, image renforcée, et la planète un peu moins en feu.
Des pionniers français et internationaux qui montrent la voie
L’Oréal oriente désormais des centaines de millions vers des placements responsables et exige de ses banques des politiques fossiles claires,
Danone, Camif, Nature & Découvertes (groupe Fnac-Darty, à mission) ont toutes entamé le mouvement,
Salesforce inclut désormais la politique climat de ses banques dans son « Sustainability Exhibit » imposé à tous les fournisseurs.
Et les PME ? Elles sont surreprésentées dans les sociétés à mission et B Corp. Elles travaillent avec des banques très importantes, bien plus carbonées qu'elles, et disposent donc d'un levier considérable pour réduire leurs émissions de CO2 embarquées. Le directeur financier dormira mieux, le comité de mission sera ravi, et les collaborateurs en parleront fièrement.
2026 sera l’année de la bascule
Avec la CSRD et la montée en puissance des investisseurs responsables, la trésorerie risque d'être associée à un risque de réputation. Les trésoriers qui auront agi seront célébrés comme les nouveaux héros de la transition.
Sociétés engagées, il est temps de passer à l’action. Votre raison d’être ne s’arrête pas à la porte de votre siège. Elle doit irriguer jusqu’au dernier euro de votre compte bancaire.
Commencez dès la semaine prochaine :
Faites un audit climat de vos placements de trésorerie avec Axylia
Intégrez un objectif « trésorerie alignée 1,5 °C » dans votre prochaine matrice de mission.
Parlez-en autour de vous. Une société à mission ou B Corp qui bouge entraîne les autres.
Votre trésorerie n’a plus le droit de dormir. Faites-en une force vive pour la planète.
Envie d’être accompagné ? Contactez nous :
Vincent Auriac, Président : vincent.auriac@axylia.com,
Ferdinand Raffy, Chief Carbon Officer : ferdinand.raffy@axylia.com
Lucie Berthomier, Analyste : lucie.berthomier@axylia.com.









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