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  • Photo du rédacteurVincent Auriac

L'assurance vie part à la renverse

L'ACPR (Autorité de contrôle prudentiel et de résolution, l'organe de supervision français de la banque et de l'assurance) vient de publier son dernier rapport sur le marché de l’assurance-vie en 2018. Il est remarquable par sa densité statistique tout au long des 60 pages. Une richesse qui tranche avec la parcimonie des relevés annuels envoyés par les assureurs qui fournissent peu d'éléments aux assurés pour se projeter dans les rendements futurs de leurs contrats.

La rapport de l'ACPR met en lumière un certain nombre d'évolutions des contrats d'assurance vie, dans un contexte exceptionnel sur les marchés financiers. Nous vous proposons de vous les faire découvrir à travers une sélection de graphiques commentés.


Une baisse historique des rendements



Par sa politique de rachat d'obligations, la Banque Centrale Européenne a poussé le taux moyen des obligations à l'émission (TME) à un niveau jamais vu. Il est négatif depuis juillet (-0,01%). Le TME s’établit à -0,21% fin septembre 2019. S'il en reste là, la moyenne 2019 s'établira à 0,12% fin décembre.


Le taux technique (rendement minimum sur lequel s’engage un assureur) était maintenu à 0,25% depuis juin 2016. La situation est donc compliquée depuis plusieurs années. Le taux technique est à 0% depuis août 2019. Ce niveau symbolique a finalement déclenché la réaction des autorités de tutelle et des assureurs. Une réaction qu'on pourrait qualifier de tardive compte tenu des montants en jeu.



Les clients se précipitent ils sur l'assurance vie ?



L'autre produit "chouchou" des Français - le livret A - ne rapporte que 0,75%. Cela ne provoque pas pour autant d'explosion, preuve probablement que les souscripteurs ne sont peut être pas les mêmes. En effet, la collecte est stable sur les contrats en euros (± 80 Milliards €).




Les rachats (sorties) sont également stables. Si on rapporte ces rachats à l'encours, on obtient durée de conservation implicite moyenne de 14 ans.


Quelle politique de placement des assureurs ?

Les assureurs placent ils l'argent avec l'année 2033 en ligne de mire ? Pas vraiment, notre observation nous conduit à penser que la durée des obligations en portefeuille est plus proche de 8 ans. 8 ans c'est aussi la durée qui est dans la tête de tous les Français car c'est au bout de ce temps que l'exonération des plus-values est acquise.



Pour garantir le capital et sécuriser le rendement, les assureurs détiennent principalement des obligations (72%) : 30% émises par des banques, 28% par des Etats et 14% par des entreprises.

Pour dynamiser la performance et dans un souci de diversification, les assureurs ont investi en actions (14%) mais très modestement en immobilier (1%). Compte tenu des 14 ans d'horizon de placement, l’allocation apparaîtrait conservatrice. On est surpris par le poids des obligations surtout à ce stade du cycle des taux. Rappelons que les taux obligataires français atteignaient 15% au milieu des années 80...il y a 35 ans !


Quel rendement pour demain ?



Le taux de revalorisation moyen des contrats est inchangé en 2018 à 1,83% en 2018 par rapport à 2017 (source ACPR). Cette stabilité tranchait avec la baisse du TME, de 0,85% à 0,8%.

La forte baisse du TME cette année (-0,21% fin septembre) devrait, selon nos calculs, tirer le taux de revalorisation moyen vers 1,41%.



Dans ce contexte, la diversification en actions permet en théorie de verser aux assurés les dividendes des actions (3,7%) soit une contribution de 0,5% (14% x 3,7%). L'immobilier qui procure des rendements intéressants (5 à 6%) mais les assureurs en possèdent trop peu pour inverser la baisse générale.

Par ailleurs, les assureurs gardent en provisions les plus-values enregistrées sur les placements. Dans son rapport, l'ACPR indique que ces plus-values représentent 4,3% des encours soit pas loin de 3 ans de rendement, de quoi arrondir les fins d'année.



Que vont faire les assureurs de ces plus-values ? Seront elles distribuées aux souscripteurs ? Leur fidélité le justifierait. Mais la distribution des plus-values c'est l'ubac de l'assurance vie.

Si le taux de revalorisation des assurés va sensiblement baisser en 2019, il n'en est pas de même pour la rentabilité des assureurs. Le chargement moyen (poids des frais) est stable autour de 0,6%. Il ne représentait que 13% du TME en 2007, ce chiffre explose pour atteindre 260% de ce même TME.





Leur rentabilité économique est au plus haut depuis 3 ans.



Des pistes pour demain ?


Il faudrait attendre 2022 pour voir le rendement moyen de l'assurance vie passer sous la barre symbolique du 1%. Les assureurs disposent d'un conséquent matelas de plus-value pour lisser cette baisse et récompenser la fidélité des assurés. Ca laisse un peu de temps pour s'organiser. Les Français sont attachés aux placements sûrs et rechignent à basculer fortement vers les Unités de Compte (UC). Ils n'ont pas complètent tort car ils sont un peu seuls pour se retrouver dans le maquis de UC et ont souvent été conduits à les souscrire aux plus mauvais moments. Une piste parait résider dans un rallongement de la durée de placement recommandée pour la rapprocher de la durée de conservation (14 ans). Les assureurs pourraient alors envisager une plus grande diversification des actifs et une gestion plus active et justifier par là même leur rémunération qui paraît généreuse pour un travail de portage à l'échéance des obligations (pour près de trois-quarts des encours). Une autre piste pourrait consister à augmenter l'allocation de l'immobilier : les 13 milliards d'euros détenus par les assureurs sont une goutte d'eau par rapport à un marché immobilier français très profond. Voilà un sujet de responsabilité sociale dont doivent s'emparer les sociétés d'assurance pour rendre concret notre droit au logement. Logements vacants, logements sociaux, logement vétustes,... autant de segments qui attendent des réponses. Et les souscripteurs ont toutes les chances de valider cette démarche car l'immobilier d'habitation est le placement préféré des Français.

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